Montre-moi comment tu danses, je te dirai comment tu perçois ton corps

Je considère la danse comme le reflet du rapport que l'on a au corps, de notre rapport à nous. La fluidité, la légèreté, le geste qui se balade sur le rythme de la musique ne peut se faire que lorsqu'on lâche prise. Tout dépends du style de danse. Le Moderne-jazz n'a rien à voir avec la danse classique.

Durant les années où j'étais malade, ma façon de danser transcendait le rapport que j'avais à mon corps, rigide. J'étais comme un bâton de bois, raide. J'avais du mal à prendre du plaisir en dansant. Ressentir mon corps, à en percevoir les contours, tout cela m'échappait. Il n'y avait rien de fluide, rien de gracieux.

J'avais cette manière de mentaliser le mouvement plutôt que de le ressentir. La dysmorphie biaisait ma perception au beau, au désirable.

J'admirais ma professeure de danse si sensuelle dans son mouvement. Sa capacité à lisser son corps suivre le flow m'émerveillais. J'aspirais à ressentir la même chose. Être aussi sensuelle et à l'aise qu'elle. De danser sans mentaliser le mouvement, ni jugement.

Les troubles du comportement alimentaire n'affectent pas seulement notre rapport à la nourriture. Ils biaisent toute notre perception du monde. La rigidité se manifeste partout, dans tous les domaines. Le "tout ou rien". Ce besoin constant de perfection, de validation.

Ma manière de danser a évolué parallèlement à ma guérison des TCA. Plus je lâchais prise avec la nourriture, plus je gagnais en confiance et plus le plaisir de danser grandissait. Enfin je pouvais sentir mon corps vibrer.

Aujourd'hui, j'adore danser. Quand j'ai un moment de libre, je mets un morceaux de soul ou de disco, ferme les yeux et me laisse emporter par la musique.

Mon rapport avec mon corps est désormais bienveillant. Je ne suis plus obsédée par la quête énergivore de la perfection. Mon corps me permet de faire, de ressentir, d'agir, de prendre du plaisir.

Quand on me dit : "Waow j'adore ta façon de bouger", c'est pour moi une victoire supplémentaire sur la maladie. C'est peut-être là la clé pour se libérer des TCA: Réintégrer les plaisirs simples dans notre vie.